Coup de poignard dans le dos ? Coup de canif dans le contrat ? Le pardon est la seule solution à ces drames humains. Il est conditionnel, mais reste un impératif divin. Les bonnes excuses, motivées par l’amour, ne peuvent pas le remplacer. Seul moyen pour la vraie libération de la victime, il reste l’étape préparatoire incontournable à la réconciliation et la guérison intérieure. Tour d’horizon.
#1. Accordez le pardon, c'est un ordre du ciel !
Le pardon est un sujet ultra sensible, qu’on soit croyant ou pas. Dans une perspective chrétienne, la rémission d’une offense subie n’est pas une option parmi tant d’autres. Non. Dieu nous y invite très fortement, pour ne pas dire qu’il nous y oblige. Pourquoi ? Parce qu’aucun de nous n’est parfait, et pourtant il nous pardonne. C’est pourquoi, à notre tour, nous devons également accorder le pardon à ceux qui agissent mal envers nous. C’est un principe fondateur du christianisme. D’ailleurs, la prière du Notre Père, reconnue par les protestants et les catholiques, exprime explicitement la demande du pardon réciproque. Si nous refusons de pardonner à notre prochain, Dieu ne nous pardonnera pas non plus nos fautes. C’est donc une affaire extrêmement sérieuse. En un mot, adoptons le mindset du pardon en mode 70 fois 7 fois. C’est une question de vie ou de mort !
#2. Le pardon est conditionnel
Quoi ?! OK, certaines personnes ne sont pas d’accord avec le principe du pardon conditionnel. Pour elles, il faudrait pardonner, peu importe la tromperie ou la trahison. Tout le monde aurait un peu tort et raison à la fois, et le principal serait de passer à autre chose. C’est réducteur. Quand il y a eu des abus réels, l’offensé est la victime et l’offenseur le coupable. Pour entrer dans une rémission véritable, il faut que le coupable reconnaisse ses torts. Et oui. Une vraie prise de conscience et un changement d’attitude concret pour pouvoir formuler une demande de pardon. Jésus l’a clairement enseigné. Nous devons bien comprendre que le pardon chrétien ne se brade pas, il s’accorde. (un accord est trouvé entre l’offenseur et l’offensé). La douleur est parfois très vive chez la victime et, sans l’aide du ciel, elle ne peut pas pardonner. Impossible. C’est pourquoi il faut vraiment poser des gestes forts pour que tout prenne du sens et qu’un nouveau chemin s’ouvre. Sinon, c’est un peu la soupe du pardon à la bonne franquette ! Cependant, si l’offenseur ne fait aucune démarche ou si il ne peut plus le faire, il faut donner ce dossier non résolu au Seigneur. Il va s’en charger.
Accorder le pardon selon différents cas de figures
Il faut bien identifier son bourreau. Certains offenseurs reconnaissent facilement leurs erreurs et c’est simple de leur accorder le pardon. D’autres, égocentriques, exigent beaucoup des autres pour combler un mal-être intérieur. Bien souvent, ils blessent leur prochain sans en avoir réellement conscience. Et c’est compliqué pour eux de demander pardon puisqu’ils se définissent constamment comme victimes. C’est ce qu’explique très bien Jacques Poujol, pasteur et thérapeute. Et d’autres encore sont des offenseurs manipulateurs et malveillants qui ne reconnaissent jamais leurs torts. Impossible de vivre un réel pardon chrétien avec cette catégorie d’individus. Au contraire, il faut les fuir !
#3. Pardonner et excuser : c'est différent !
Trop souvent, on confond le pardon et les excuses. Soyons clairs. Dans le texte biblique original, ce ne sont pas les mêmes mots. C’est vrai que l’amour excuse tout et que c’est la vertu ultime. Un grand enseignement pour nous. Mais comprenons bien les choses. Une vraie rémission des erreurs est possible suite à une prise de conscience et la négociation d’un nouveau terrain d’entente. Mais au nom de l’amour, qui est plus fort que le pardon, nous pouvons réellement passer au-dessus de l’offense. La couvrir. Etre discret pour ne pas discréditer l’offenseur. En gros, les excuses, ce sont un peu les circonstances atténuantes qu’on trouve parce qu’on a réellement de l’amour pour celui qui nous a offensé. Mais on ne fait pas l’impasse sur le pardon au nom de l’amour. Logique, non ?…
#4. La rémission de l'offense libère...l'offensé
Pourquoi accorder le pardon ? Pour se libérer soi-même. Quand on refuse de pardonner, on subit la blessure et le mal qu’on s’inflige en entretenant de la rancune, de la colère ou de l’amertume. Sylvie Chokron, membre du laboratoire de psychologie et neurocognition à Grenoble, explique très bien que le réflexe naturel de l’être humain, c’est la vengeance. Mais elle a des répercussions sur la santé mentale et sur la santé physique. Il faut donc apprendre à réguler ses affects face à l’offense en faisant preuve d’empathie et en ayant un certain recul. Ne jamais réagir à chaud. En un mot, pardonner, c’est se placer au dessus de la bassesse des coups bas et le faire pour son propre bien-être. Ni plus ni moins.
#5. Le pardon chrétien, partie émergée de l'iceberg
C’est quoi la logique du pardon à la bonne franquette ? La rémission des torts, se réconcilier, oublier et repartir tête baissée comme avant. Quelle folie ! Dans la Bible, l’exemple de Jacob et Esaü est très parlant. Le frère ainé a pardonné au cadet sa fourberie et ils se sont embrassés avec des larmes sincères. Mais chacun à repris son propre chemin. D’ailleurs, s’il y a eu un vrai dilemme, il faut en tirer les leçons. Partir sur de nouvelles bases en fixant de nouvelles limites. Sinon, c’est le signe qu’on n’a pas compris ce qu’on a subi. Oublier ? Malheureusement, nous avons tous une mémoire. C’est très compliqué d’oublier le mal qu’on nous a fait. Mais on peut laisser le soin à Dieu d’effacer la peine. C’est le but de la guérison intérieure. Oui, parce que guérir dans toutes les dimensions de notre être fait partie du plan de Dieu pour nous. La guérison intérieure et profonde vient après le pardon chrétien et demande parfois beaucoup de temps, de patience et de compréhension. Les chrétiens ne sont pas des robots. Rien n’est automatique, ni systématique. Et non, rien.
Comment conclure cet article ? Peut-être en demandant solennellement pardon à ceux qui n’auraient pas compris des actions, des attitudes ou des propos de ma part. Oui, être croyant, c’est aussi savoir être vulnérable parfois. Et si nous ne sommes plus capables de l’être, peut-être avons-nous un peu renié la foi que nous confessons. Peut-être…Chacun pensera pour lui-même.
Sources : La Bible.
« La colère et le pardon, un chemin de libération » de Jacques Poujol, collection essenCiel, paru aux éditions Empreinte Temps Présent.
« L’intelligence du pardon » de Sylvie Chokron, article paru dans le magazine « Cerveau et psycho » n°135 de septembre 2021.
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